L'esclavage dans les colonies des Amériques, est né de la traite des esclaves noirs, transplantés de force et dans des conditions épouvantables d'Afrique aux Antilles. Cependant traite et esclavage ce n'est pas la même chose.
Au XVII° siècle ce sont des compagnies à privilèges comme la Compagnie du Sénégal qui avaient obtenu le monopole de l'introduction des esclaves, pour l'introduction desquels aux colonies, ils percevait une prime La traite clandestine à cette époque c'est le fait que des navires, en particulier Hollandais, ont introduit clandestinement des esclaves en violation d'un monopole concédé par le Roi. On appelait ce trafic, "l'interlope".
Au début du XIX° siècle, certains pensent que si on abolit la traite on va forcer le système esclavagiste à se transformer, puisque n'ayant plus les moyens de se procurer une nouvelle main d'oeuvre esclave à bas prix, on sera contraint de mieux traiter les esclaves. C'est ainsi qu'une importante campagne en faveur de l'abolition de la traite a conduit le Gouvernement Anglais à interdire la traite en 1807. Cependant l'esclavage va continuer dans les îles anglaises jusqu'en 1834, plus une période d'apprentissage de plusieurs années.
S'agissant des colonies françaises, l'esclavage a définitivement été aboli en 1848 sous la Seconde République . Cependant ce fut au terme d'un long processus.
L'esclavage a été aboli une première fois en 1794, le 4 février, (16 pluviose an III) par la Convention.
Mais dans la Colonie de Saint Domingue devenue Haïti, pressé par la révolte généralisée des esclaves, le Commissaire de la Convention Santhonax, a proclamé l'abolition de l'esclavage le 29 Août 1791.
L'abolition de l'esclavage sera appliquée à la Guadeloupe. Puis c'est le drame du rétablissement de l'esclavage le 20 mai 1802, par Bonaparte alors Premier Consul et l'héroïsme de ceux qui se sacrifièrent à la Redoute de Matouba plutôt que de s'y soumettre. La même tentative de rétablir l'esclavage à Saint Domingue est un fiasco pour les français.
L'abolition de 1794 ne sera pas appliquée à la Martinique l'île ayant été prise par les anglais. La Martinique redevenue colonie française avec le retour d'un roi en France a vécu une période de plus de 20 ans durant laquelle la traite a de fait pratiquement été abolie, car les anglais ont pratiquement fait cesser la production du sucre en fermant leur marché aux sucres de la Martinique, rendant inutile l'importation d'esclaves de traite, puis à partir de 1807 ont interdit la traite. Cependant l'esclavage lui n'a pas été aboli. Les esclaves sont cependant devenus des "libres de savanes" ou "libres de fait". Ils doivent se débrouiller pour se nourrir eux même sur leur jardins à vivre, ou grâce à l'exercice d'un métier pour les "nègres à talent".
Le retour sous la domination française à partir de 1818, va s'accompagner, d'une féroce répression pour forcer les libres de savanes à retourner dans les ateliers de leurs anciens maîtres et de la reprise de la traite négrière.
C'est durant cette période que vont éclater les révoltes les plus importantes comme celle du Carbet qui éclate le 12 février 1822 (voir le blog : http://revolte-du-carbet.blogspot.com/).
Alors qu'est cette traite clandestine ? C'est la traite qui est pratiquée alors qu'en théorie elle est interdite.
Mais quand la traite a t' elle été interdite ?
Les Anglais on l'a vu ont décidé de l'abolition de la traite en 1807. L'abolition de la traite concernant la France c'est beaucoup plus compliqué.
On doit partir du Traité de Paris de 1814 après la première abdication de Napoléon. Là le plénipotentiaire anglais Lord Castlereagh a imposé à Talleyrand le représentant français la signature d'un protocole qui prévoit que "la France devra interdire la traite par ses ressortissants dans les cinq ans". Le détail doit être discuté lors d'un congrès prévu à Vienne.
C'est le Congrès de Vienne qui débute en novembre 1814. C'est une grande conférence diplomatique ou se décidera le devenir de l'ancien Empire français par les vainqueurs qui doivent y redéfinir les frontières en Europe. Ce congrès est aussi l'occasion de discussion sur d'autres questions dont la libre circulation navale ou et c'est ce qui nous intéresse "l'abolition de la traite des noirs".
L'abolition de la traite est inscrite dans l'alinéa 15 de l'article 118 du traité en discussion.
Que dit cet article 118 ?
"Confirmation des traités et actes particuliers.
Les Traités, Conventions, Déclarations, règlements et autres actes particuliers qui se trouvent annexés au présent acte et nommément : ...
15° La Déclaration de Puissances sur l'abolition de la traite des nègres du 8 février 1815 sont considérés comme parties intégrantes des arrangements du Congrès et auront la même force et valeur que s'ils étaient insérés mot à mot dans le Traité général."
Voilà donc ce qui fonde l'abolition de la traite.
Sauf que il n'y a pas eu de texte formellement signé par la France.
Pourquoi ?
Parce que le 1° mars 1815 c'est le retour surprise de l'île d'Elbe en France de Napoléon, et le début des "cents jours". L' Europe tremble tandis que le Congrès se poursuit à Vienne jusqu'au 9 juin 1815, les principaux plénipotentiaires ont quitté Vienne, quelques jours avant la fin des cent jours et la seconde abdication de Napoléon du 22 juin 1815.
S'en suit une période durant laquelle on ne sait pas avec certitude si la traite a été abolie ou pas.
Un premier cas : le Louis.
Le premier cas qui va soulever cette question se présente très tôt début 1816, c'est celui du"Louis".
C'est un navire français parti de Martinique le 30 janvier 1816 pour un voyage de traite aller retour à la la côte d' Afrique. Il est saisi non loin du Cap Mesurade le 11 mars 1816 par un navire de la chasse Anglaise. Il embarquait alors 12 esclaves. Il est conduit en Sierra Léone. Cette saisie est effectuée conformément au traité franco anglais du 20 novembre 1815 et à la loi française qui déclarent la traite illicite. Les armateurs français font appel et déclarent qu'à la date de la saisie la traite n'était pas encore abolie en France. Les minutes de ce procès sont imprimées à Londres dans un document "Report of the case of the Louis, Forest, Master, Appelead from the Vice-Admiralty Court at Sierra Leone and determined in the High Court of Admiralty " daté du 15 décembre 1817.
Il y eu d'autres cas. Une plainte de l' Amiral Anglais des îles sous le vent en date du 6 novembre 1816 indique qu'un navire français a importé 500 esclaves vendus en toute impunité à la Martinique et que d'autres bâtiments y sont attendus.
Selon les minutes anglaises et le rapport publié en français à la Chambre des Communes "DE L'ETAT ACTUEL DE LA TRAITE DES NEGRES ...du 8 mai 1821. On trouve dans une lettre de Lord Casteragh du 8 mars 1817, qu'entre juin 1815 et octobre 1816, cinq bâtiments étaient entrés à la Martinique avec des esclaves de traite, qu'un brigantin Portugais l'Eleonora commandant Victor Debrito y avait importé 265 esclaves et que en outre plusieurs navires frêtés à Saint Pierre pour la traite étaient en mer.
C'est en 1817 qu'un texte français interdit la traite des noirs.
La traite illicite si peu clandestine après 1817.
Le rapport ci dessus indiqué contient en 85 pages un nombre impressionnant d'expéditions de traite, ainsi que de nombreux documents montrant qu'il ne s'agit en rien d'une opération réellement clandestine, car présentées comme des importations de mulets.
Elle sont parfois connues des autorités à Paris. Ainsi l'opération de traite du "Rodeur" capitaine Boucher de 1819. Elle a fait l'objet d'une description horrible et détaillée par la faculté de médecine de Paris, alors même que le Gouvernement français en nie l'existence aux autorités anglaises, car une aladie des yeux très contagieuse s'y est déclaré o bord et l'on a liquidé la quasi totalité de la cargaison esclave lors de la traversée. Ce navire reprendra une seconde traversée avec le même capitaine devenu borgne quelques mois plus tard.
Après le décret de 1817 interdisant la traite le rapport anglais signale plus de 13 navires négriers de Martinique et de Guadeloupe. Entre 1819 et 1820 on en découvre entre 50 et 60 dont la "Jeune Estelle" Commandant Sanguines de Martinique. Dans le même temps plusieurs navures sont partis de Honfleur dont "la Valentine" avec 300 esclaves pour la Martinique mais aussi 'L'Eclair". Les autorités françaises ferment volontairement les yeux cela ne fait aucun doute. Au Sénégal et à Goré on détourne allègrement la loi en opérant des ventes à l'intérieur . Même les employés nommément désignés du Gouvernement Français au Sénégal font de la traite. Ainsi le cas du navire "Les deux soeurs" Capitaine DElomosne armé à Honfleur qui a apporté 150 esclaves à la Martinique. les autorités n'arrivent pa à trouver l'Armateur Monsieur Colin de Honfleur asocié à la maison Relouis que les anglais n'ont aucune peine à identifier. Le même Commandant Delosmone commandera en 1820 "La Valentine" qui transporta 800 esclaves à la Martinique.
En 1819 la "Rosalie " armée à Honfleur débarque une cargaison à la Martinique.
Tandis que "La Sylphe débarque une carfaison à la Guadeloupe avant d'être saisie en 1819.
Un observateur signale aux anglais à la Guadeloupe, un débarquement de 60 esclaves à Port Louis le 1° décembre 1820. Il signale aussi les débarquement de "la Thétis" de "l'Atalente" de "l'Adèle Aimé". Il désigne des négriers de la Guadeloupe, Segond souvent associé à Fox, ou à Rancé.
On trouve aussi des appels à la constitution de capitaux pour des opérations de traite opérés quasiment au grand jour, à peine maquille t'on les opérations de traites des nègres en traite de mulets.
Et puis il y a ces nombreuses expéditions de traites à la Martinique signalées dans ce blog entre 1828 et 1831.
EN 1831 ON A ENFIN IDENTIFIER QUI PEUR ARRETER LA TRAITE : LES ARMATEURS
Une texte est publié en 1831 il précise qu'à partir de sa dtae de publication ce sont désormais les armateurs qui seront condamnables du crime de traite avec condamnation aux galères si l'un de leur navire est convaincu de traite. Jusqu'alors seuls les capitaines et l'équipage étaient recherchés. Cela change tout.
La traite négrière sous pavillon français cesse alors.